Comment passer en toute sécurité d'un médicament générique à la marque d'origine

Comment passer en toute sécurité d'un médicament générique à la marque d'origine
9 déc., 2025
par Jacqueline Bronsema | déc., 9 2025 | Santé & Bien-être | 0 Commentaires

Vous avez pris un médicament générique pendant plusieurs semaines, et quelque chose ne va pas. Vous vous sentez différent. Vos symptômes reviennent. Vous avez une éruption cutanée, des étourdissements, ou simplement l’impression que ça ne fonctionne plus comme avant. Vous vous demandez : peut-on revenir à la marque d’origine ? Et surtout, comment le faire en toute sécurité ?

Les génériques ne sont pas tous identiques à la marque - même si la loi le dit

La loi exige que les médicaments génériques contiennent la même substance active, à la même dose, et dans le même format que la version de marque. C’est la base de la bioéquivalence : une plage de 80 à 125 % de l’absorption dans le sang par rapport à la marque. Pour la plupart des gens, ça marche parfaitement. Mais cette règle ne dit rien sur les ingrédients inactifs - les colorants, les liants, les conservateurs, les excipients. Et c’est là que les problèmes commencent.

Un patient atteint de maladie inflammatoire de l’intestin a pu développer une poussée après avoir switché d’un générique à base de lactose à un autre sans lactose. Une personne sous lévothyroxine a vu son TSH exploser après un changement de fabricant de générique. Un patient sous warfarine a eu des saignements parce que le nouveau générique affectait légèrement l’absorption. Ces cas ne sont pas rares. Selon une étude de la FDA en 2021, 14,3 % des événements indésirables liés aux médicaments impliquaient un changement de formulation, y compris le passage d’un générique à une marque ou entre deux génériques.

Quand est-ce vraiment nécessaire de revenir à la marque ?

Revenir à la marque n’est pas une question de préférence personnelle. C’est une décision médicale. Voici les situations où ça peut être indispensable :

  • Vous avez une réaction allergique à un excipient du générique (comme le colorant rouge n°40, le lactose, ou le gluten dans certains comprimés)
  • Vous prenez un médicament à index thérapeutique étroit : warfarine, lévothyroxine, phénytoïne, cyclosporine, ou certains anticonvulsivants
  • Vous avez eu une perte de contrôle de votre maladie malgré une dose stable (ex : taux INR instable, crises d’épilepsie inexpliquées, rejet d’organe transplanté)
  • Vous avez essayé plusieurs génériques et aucun ne vous convient

Les médicaments à index thérapeutique étroit sont les plus sensibles. Une variation de 5 % dans l’absorption peut faire la différence entre une efficacité optimale et un échec thérapeutique. Pour ces médicaments, la FDA recommande une plage de bioéquivalence plus serrée : 90 à 111 %. Mais même ça ne garantit pas une réponse identique chez tous les patients.

Le processus légal et médical pour revenir à la marque

Vous ne pouvez pas simplement demander à la pharmacie de vous donner la marque. La loi et les assurances ne le permettent pas sans justification. Voici les étapes clés :

  1. Documentez clairement l’échec du générique : Notez les symptômes, les dates, les résultats de bilans (TSH, INR, taux sanguin, etc.). Un simple « je me sens mal » ne suffit pas. Vous avez besoin de données.
  2. Consultez votre médecin : Il doit évaluer si la cause est bien liée à la formulation. Il ne peut pas juste signer un papier par sympathie. Il doit justifier médicalement pourquoi la marque est nécessaire.
  3. Remplissez un formulaire « Marque médicalement nécessaire » : En France, ce n’est pas un formulaire unique, mais votre médecin doit écrire sur l’ordonnance : « Substitution interdite - traitement de marque nécessaire » ou « Dispense en marque uniquement ». En cas de prescription électronique, il doit cocher la case « médicament de marque exigé » dans son logiciel de prescrit.
  4. Précisez exactement la marque : Ne dites pas « la marque de la lévothyroxine ». Dites « Synthroid 50 mcg » ou « Euthyrox 75 mcg ». Certains génériques sont fabriqués par la même entreprise que la marque - mais ce n’est pas toujours le cas. Il faut être précis.
  5. Initiez un suivi thérapeutique : Après le switch, votre médecin va vérifier vos valeurs biologiques dans les 7 à 10 jours. C’est obligatoire pour les médicaments à index étroit.

Les obstacles que vous allez rencontrer (et comment les surmonter)

Le plus gros problème ? L’assurance. Les mutuelles et la Sécurité Sociale veulent que vous preniez le générique. Elles refusent de payer la marque sans preuve solide.

Voici ce que disent les données :

  • 68 % des patients qui demandent un retour à la marque rencontrent un refus initial de leur assurance
  • 41 % des pharmaciens refusent de délivrer la marque sans une ordonnance clairement annotée
  • Le délai moyen pour obtenir une autorisation de remboursement est de 14 jours

Comment faire pour que ça marche ?

  • Exigez que votre médecin ajoute des résultats de laboratoire à l’ordonnance (ex : « TSH passée de 2,1 à 8,7 après changement de générique »)
  • Si votre médecin ne connaît pas le processus, envoyez-lui un modèle de lettre d’explication disponible sur le site de la HAS (Haute Autorité de Santé)
  • Appelez votre mutuelle : demandez à parler à un « conseiller médical » et non à un simple agent. Expliquez que vous demandez une exception médicale, pas une simple préférence
  • Conservez toutes les preuves : emails, courriers, numéros de dossier, dates d’appel

Les cas les plus réussis ? Ceux où le médecin a écrit clairement « Substitution interdite - risque de décompensation » et a joint les analyses. Dans ces cas, l’acceptation passe à plus de 80 %.

Médecin écrivant une ordonnance avec 'Substitution interdite' tandis qu'un patient montre des résultats de laboratoire.

Les risques de ne pas bien gérer le switch

Revenir à la marque, c’est bien. Mais si vous le faites mal, vous risquez de vous mettre en danger.

  • Un patient qui a arrêté son générique sans consulter et a attendu 3 semaines pour obtenir la marque a eu une crise d’épilepsie
  • Un autre a pris deux doses différentes en même temps par erreur - une du générique, une de la marque - et a eu une intoxication
  • Beaucoup de patients pensent que « la marque est meilleure » et en prennent deux fois la dose, ce qui peut être mortel pour certains traitements

La règle d’or : ne changez jamais vous-même de médicament sans l’accord de votre médecin. Même si vous êtes convaincu que la marque vous va mieux, le passage doit être supervisé. Il faut une transition contrôlée.

Coût et remboursement : ce que vous devez savoir

La marque coûte 3 à 5 fois plus cher qu’un générique. Pour un traitement de lévothyroxine, la marque peut coûter 45 € par mois contre 12 € pour le générique. En France, la Sécurité Sociale rembourse les deux à 65 %, mais la mutuelle peut refuser de couvrir la différence si la marque n’est pas justifiée médicalement.

Heureusement, depuis 2023, la HAS a renforcé les critères pour les exceptions. Si votre médecin justifie correctement, la mutuelle doit rembourser la différence. Les patients ayant un diagnostic de maladie auto-immune, d’épilepsie, ou d’insuffisance thyroïdienne sévère ont plus de chances d’obtenir le remboursement intégral.

Et si votre mutuelle refuse ? Vous pouvez faire un recours. Envoyez une lettre de contestation avec vos preuves. 64 % des recours sont acceptés si la documentation est complète.

Les alternatives : et si la marque n’est pas disponible ?

Parfois, la marque n’est plus en stock. Ou votre médecin ne veut pas la prescrire. Que faire ?

  • Essayez un autre générique - pas n’importe lequel. Demandez à votre pharmacien de vous proposer un générique du même fabricant que celui qui vous allait bien avant
  • Utilisez les « génériques autorisés » : ce sont des versions identiques à la marque, produites par le même laboratoire, mais vendues sous un nom générique. Elles sont souvent plus stables
  • Si vous êtes dans un cas très particulier (transplantation, cancer, neurologie), votre médecin peut demander une « autorisation temporaire d’utilisation » (ATU) pour obtenir la marque sans passer par la mutuelle
Séquence en trois parties montrant un patient passant du générique à la marque de médicament sous supervision médicale.

Les témoignages réels : ce que disent les patients

Sur les forums, les expériences sont partagées. Une patiente de Lyon, Marie, a écrit : « J’ai eu une éruption cutanée après le changement de générique de mon traitement pour l’hypothyroïdie. J’ai demandé Synthroid. Le médecin a écrit « allergie aux colorants » sur l’ordonnance. La mutuelle a refusé la première fois. J’ai envoyé les photos de l’éruption et les analyses de TSH. La deuxième fois, ils ont accepté. Depuis, je vais bien. »

Un autre patient, Jean, a dit : « J’ai perdu 6 mois à essayer trois génériques différents pour ma warfarine. Chaque changement, j’avais un INR qui partait en vrille. Mon médecin a fini par dire : « Prenez la marque. » Ça a pris 10 jours pour que l’assurance l’accepte. Mais depuis, je n’ai plus eu de saignement. »

Les réussites ne sont pas rares. Mais elles viennent toujours avec une chose : une documentation claire, une communication avec le médecin, et de la persévérance.

Que faire si vous avez déjà changé sans avis médical ?

Si vous avez déjà switché vous-même, ou si vous avez pris un générique par erreur, voici ce qu’il faut faire :

  • Ne changez pas de nouveau médicament sans consulter
  • Prenez une photo de l’emballage du médicament que vous avez pris
  • Prenez note des symptômes : quand ils ont commencé, à quelle fréquence, et s’ils s’aggravent
  • Prenez rendez-vous avec votre médecin dans les 48 heures
  • Apportez les deux emballages (le générique et la marque) pour qu’il puisse comparer les excipients

Le plus important : ne culpabilisez pas. Beaucoup de patients font ça par peur, par confusion, ou parce qu’ils n’ont pas été informés. Ce qui compte, c’est ce que vous faites maintenant.

Le futur : des changements à venir

En 2024, la France va introduire un nouveau système de traçabilité des médicaments. Chaque boîte aura un code permettant de savoir exactement quel fabricant a produit le générique. Cela permettra aux médecins de savoir si un patient a été exposé à plusieurs formulations différentes.

De plus, les laboratoires sont obligés de signaler tout changement de formulation à l’ANSM. Si un générique change de liant ou de colorant, votre médecin sera averti. Vous ne serez plus obligé de deviner pourquoi ça ne fonctionne plus.

Le message est clair : les génériques sont excellents pour la majorité. Mais la santé n’est pas une statistique. Si votre corps réagit mal, vous avez le droit d’exiger une solution adaptée à vous. Il suffit de savoir comment demander - et comment justifier.