Lois d'État sur la substitution générique : un mélange complexe de régulations aux États-Unis

Lois d'État sur la substitution générique : un mélange complexe de régulations aux États-Unis
15 déc., 2025
par Jacqueline Bronsema | déc., 15 2025 | Santé & Bien-être | 1 Commentaires

Chaque année, plus de 6 milliards d'ordonnances sont remplies aux États-Unis. Et dans près de 93 % des cas, le pharmacien peut remplacer le médicament de marque par une version générique. Mais ce n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît. Les règles changent complètement d’un État à l’autre. Ce n’est pas une question de bon sens ou de coût. C’est un système juridique découpé en 50 morceaux différents, avec des exigences contradictoires qui rendent la vie difficile aux pharmaciens, aux patients et même aux systèmes de santé.

La substitution générique : une règle, mais pas la même partout

En 2025, 22 États exigent que le pharmacien substitue automatiquement le médicament de marque par un générique, sauf si le médecin ou le patient refuse. Dans les 28 autres États et à Washington, D.C., le pharmacien n’est pas obligé de le faire. Il peut le faire, mais seulement s’il le choisit. Ce n’est pas une question de préférence personnelle. C’est une obligation légale. Et ça change tout.

Prenons l’exemple de deux patients voisins : l’un vit à Louisiane, l’autre à Hawaï. Tous deux ont une ordonnance pour un médicament contre l’épilepsie. Dans la Louisiane, le pharmacien remplace automatiquement. À Hawaï, il ne peut pas le faire sans l’accord écrit du médecin et du patient. Même médicament. Même maladie. Même prix. Mais deux règles totalement opposées.

Le consentement du patient : implicite ou explicite ?

En 32 États, la loi suppose que vous acceptez le générique - sauf si vous dites le contraire. C’est ce qu’on appelle le « consentement présupposé ». Vous ne signez rien. Vous ne dites rien. Et pourtant, votre médicament est changé. Dans 18 États, c’est l’inverse : le pharmacien doit vous demander expressément, à voix haute, si vous voulez le générique. Il doit attendre votre réponse. Si vous dites non, il ne peut pas substituer.

Ça semble anodin, mais ça crée de la confusion. Des patients vivant près de la frontière entre l’État de New York et le New Jersey racontent sur les forums en ligne qu’ils sont perdus. À New York, on leur demande chaque fois : « Voulez-vous le générique ? » À New Jersey, on le leur donne sans rien dire. Quand ils changent de pharmacien, ils pensent qu’on se trompe. Ou qu’on essaie de les arnaquer.

Les médicaments à indice thérapeutique étroit : où la sécurité prime sur le coût

Pas tous les médicaments peuvent être remplacés. Certains sont trop dangereux. Ce sont les médicaments à indice thérapeutique étroit (NTI). Une petite variation dans la dose - même 5 % - peut provoquer une crise, un caillot sanguin, ou un échec thérapeutique. Le warfarin (anticoagulant), la lévothyroxine (pour la thyroïde), et certains antiépileptiques comme le phénytoïne sont dans cette catégorie.

15 États ont créé leurs propres listes noires. Le Kentucky interdit la substitution pour la digoxine et les antiépileptiques. Le Minnesota a enregistré des cas d’hémorragies après un changement de générique de warfarin, malgré une équivalence thérapeutique officielle. L’FDA dit que les génériques sont équivalents. Mais des médecins et des patients affirment qu’ils ressentent une différence. Et les rapports d’effets indésirables à l’FDA MedWatch confirment : entre 2020 et 2022, 89 signalements concernaient la lévothyroxine, 53 le warfarin.

Un pharmacien perdu entre deux lois d'État différentes sur les médicaments génériques.

Les biosimilaires : la nouvelle frontière des lois d’État

Les médicaments biologiques - comme ceux pour le cancer, la sclérose en plaques ou la maladie de Crohn - sont de plus en plus courants. Leur version générique s’appelle un biosimilaire. Mais ils ne sont pas identiques. Ils sont « très similaires ». Et les États ont dû réécrire leurs lois.

En 2025, 49 États et Washington, D.C. ont des lois spécifiques pour les biosimilaires. La Floride oblige chaque pharmacie à créer une liste de biosimilaires approuvés, en s’assurant qu’ils ne représentent « aucune menace pour la santé du patient ». L’Iowa dit simplement : « Utilisez l’Orange Book de l’FDA. » Mais l’Hawaï exige toujours le consentement du médecin et du patient pour les biosimilaires destinés à traiter l’épilepsie.

En 2023, l’FDA a ajouté 17 nouvelles évaluations d’équivalence thérapeutique pour les biosimilaires. Vingt-trois États ont dû revoir leurs lois. C’est un défi constant. Les lois ne suivent pas le rythme de la science.

Les conséquences économiques : des milliards d’économies… et des risques

Depuis 2009, les génériques ont permis d’économiser 1,7 billion de dollars aux États-Unis. Les États avec des lois de substitution obligatoire ont des taux de remplissage générique de 94,1 %. Dans les États où la substitution est facultative, ce taux tombe à 88,3 %. Cela représente des milliards de dollars pour les programmes Medicaid, les assureurs, et les patients.

Une étude de 2018 a montré que les lois obligatoires économisaient 1,2 milliard de dollars par an pour les seuls programmes Medicaid. Mais ce n’est pas gratuit. Les pharmaciens passent en moyenne 12,7 minutes par ordonnance à vérifier les règles de leur État, les listes d’NTI, les exigences de notification. Pour les chaînes de pharmacies qui opèrent dans plusieurs États, c’est un cauchemar logistique. 18,3 % de leurs transactions impliquent des ordonnances croisées entre États.

Une carte des États-Unis en argile montrant les lois variées sur la substitution générique.

La technologie comme solution - mais pas une panacée

83 % des logiciels de pharmacie intègrent maintenant des vérifications automatiques des lois d’État. Cela réduit les erreurs de substitution de 64 %. Mais ça ne résout pas tout. Les systèmes peuvent mal interpréter une loi récemment modifiée. Ou ne pas prendre en compte une liste d’NTI locale. Et surtout : ils ne remplacent pas la formation humaine.

92 % des États exigent que les candidats au diplôme de pharmacien passent un examen sur les lois de substitution. Les écoles de pharmacie ont ajouté entre 45 et 60 heures de cours sur le sujet. Pourquoi ? Parce qu’un pharmacien qui se trompe peut être tenu responsable. Dans 37 États, il bénéficie d’une immunité légale - mais seulement s’il suit exactement la procédure. Une erreur de lecture, une omission de consentement, un oubli de notification : ça peut devenir un litige.

Le futur : vers une harmonisation ou une fragmentation accrue ?

Les pharmaciens, les assureurs et les groupes de patients demandent une loi nationale. L’Association américaine des pharmaciens affirme que 78 % des pharmaciens sont confus quand ils traitent des ordonnances venues d’un autre État. Le Bureau du budget du Congrès estime qu’une harmonisation pourrait générer 8,7 milliards de dollars d’économies supplémentaires d’ici 2028.

Mais d’autres craignent que l’harmonisation ne nuise aux patients vulnérables. Le National Organization for Rare Disorders avertit que 25 à 30 millions d’Américains souffrent de maladies rares qui nécessitent des médicaments à indice thérapeutique étroit. Une loi trop permissive pourrait les mettre en danger.

En 2023, la Commission des lois uniformes a proposé un modèle de loi nationale pour les biosimilaires. Mais il n’a pas encore été adopté. Pour l’instant, chaque État continue de faire sa propre loi. Et chaque pharmacien doit apprendre 50 systèmes différents.

Pourquoi les lois sur la substitution générique varient-elles tant d’un État à l’autre ?

Parce que la santé est gérée au niveau des États aux États-Unis. Chaque État a le pouvoir de réguler la pratique pharmaceutique, y compris la substitution. Les législateurs ont réagi différemment aux pressions des groupes de patients, des entreprises pharmaceutiques et des assureurs. Certains États veulent maximiser les économies, d’autres privilégient la sécurité des patients, surtout pour les médicaments à indice thérapeutique étroit. Résultat : un mélange de 50 systèmes différents.

Un pharmacien peut-il refuser de substituer un médicament même si la loi l’autorise ?

Oui. Même dans les États où la substitution est obligatoire, le pharmacien peut refuser s’il pense que cela met la santé du patient en danger. Il peut aussi refuser si le patient ou le médecin a demandé « dispense as written ». C’est un droit professionnel. Mais il doit documenter sa décision et en informer le patient. Il ne peut pas simplement refuser parce qu’il préfère la marque.

Quels sont les médicaments les plus souvent concernés par les problèmes de substitution ?

Les médicaments à indice thérapeutique étroit (NTI) : le warfarin (anticoagulant), la lévothyroxine (thyroïde), la phénytoïne et la carbamazépine (antiépileptiques), et la digoxine (cardiaque). Ce sont eux qui génèrent le plus de signalements d’effets indésirables après substitution. Même si l’FDA les considère comme équivalents, des patients rapportent des changements dans leur état - parfois mineurs, parfois graves.

Comment savoir si mon générique est autorisé dans mon État ?

Le pharmacien doit vous informer. Dans les États avec consentement explicite, il vous le demandera. Dans les autres, il doit vous notifier par écrit ou verbalement après la substitution. Vous pouvez aussi consulter l’Orange Book de l’FDA en ligne pour vérifier l’équivalence thérapeutique. Mais pour les listes d’NTI locales, il faut consulter le site du conseil de pharmacie de votre État - chaque État a sa propre liste.

Les biosimilaires sont-ils vraiment équivalents aux médicaments biologiques ?

Oui, selon l’FDA, ils sont « très similaires » et n’ont pas de différence clinique significative. Mais ils ne sont pas identiques. Leur production est plus complexe que pour les génériques classiques. C’est pourquoi certains États imposent des conditions supplémentaires : consentement du médecin, liste de biosimilaires approuvés, ou interdiction pour certaines maladies. La science continue d’évoluer - et les lois peinent à suivre.

1 Commentaires

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    Margaux Brick

    décembre 15, 2025 AT 16:26

    C’est fou comment un truc aussi simple qu’un médicament peut devenir un cauchemar administratif… J’ai un pote qui change d’État tous les ans pour son travail, et il doit garder une fiche Excel avec les règles de chaque État. C’est pas de la santé, c’est de la course d’obstacles.

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